Juliette

Juliette

N°17

Dans la rivière

     Juliette jouait au jardin avec sa poupée quand elle aperçut le papillon jaune. Il voltigeait, passant et repassant tout près d'elle.

Notre amie a trois ans et demi. Ses parents rassemblent souvent ses longs cheveux bruns en une jolie queue de cheval qui danse dans son dos.

Elle portait ce jour-là une salopette orange et des sandales de toile blanches.

Elle se leva et, laissant sa poupée dans l'herbe, elle suivit le papillon. Il s'éloignait vers le fond du jardin en survolant les pâquerettes et les boutons d'or. Il passa au-dessus de la barrière et se dirigea vers la petite rivière qui coule près du bois.

Juliette poussa la barrière pour l'ouvrir, puis traversa la prairie en marchant dans les hautes herbes.

La petite fille observait sans cesse le papillon et pas du tout l'endroit où elle posait les pieds. Elle arriva au bord de l'eau. Elle fit encore un pas en avant, toujours en regardant l'insecte, et elle tomba dans le ruisseau.


Juliette se releva, trempée de la tête aux pieds. Sa salopette orange était toute mouillée et couverte de taches de boue partout. Ses sandales de toile blanche étaient à présent brunes et pleines d'eau.

Un instant elle eut envie de pleurer, mais elle se montra courageuse et regarda autour d'elle. Il fallait sortir du ruisseau.

La berge se dressait haute, comme une petite falaise. Juliette tenta de se hisser sur le bord, mais elle ne réussit pas. C'était vraiment trop difficile, trop haut à escalader.


-Comment vais-je remonter là-haut ? dit la fillette.

Elle aperçut un poisson rouge. Il se glissait entre les roseaux. Elle l'appela trois fois.

- Poisson rouge! poisson rouge! poisson rouge!

-Que veux-tu, petite fille ?

-Je suis tombée dans le ruisseau. Comment dois-je faire pour en sortir ?

-Je n'en sais rien. Nous ne quittons jamais l'eau de notre rivière, nous les poissons.


Juliette regarda autour d'elle. Une grenouille sautait sur les feuilles rondes et vertes des nénuphars. Notre amie l'appela trois fois.

- Grenouille verte! grenouille verte! grenouille verte!

-Oui ?

-Je voudrais sortir de l'eau, mais le bord du ruisseau est trop haut. Comment dois-je faire ?

-Regarde. Fais comme moi. Saute.

Juliette sauta de toutes ses forces, mais chaque fois, elle retombait dans l'eau. Sa salopette orange, qui commençait à sécher, était de nouveau trempée.


Elle vit un écureuil brun au ventre blanc. Accroché au tronc d'un arbre, il regardait notre amie qui pataugeait les pieds dans l'eau. Elle l'appela trois fois.

- Écureuil brun! écureuil brun! écureuil brun!

-Bonjour, petite fille.

-J'aimerais retourner à la maison, mais le bord du ruisseau est trop haut. Comment puis-je faire?

-Pourquoi te trouves-tu dans l'eau ?

-Je suis tombée en suivant un papillon jaune.

-Accroche-toi à une branche basse, là, plus loin et sors en l'escaladant.

-Je ne possède pas de griffes comme toi, petit écureuil. Je ne peux pas grimper aux arbres et te suivre.


Un corbeau passait tout près. Fort surpris de voir une fillette dans la rivière, il se posa sur une branche et lança son cri.

-Croaa, croaa, croaa...

Juliette l'appela trois fois.

- Corbeau noir! corbeau noir! corbeau noir!

-Qui me demande ?

-Moi, dit notre amie. Je suis tombée dans l'eau en suivant un papillon jaune et je ne parviens pas à sortir. Les bords sont trop hauts. Tu peux m'aider ?

-Ouvre tes ailes et envole-toi, comme moi.

-Je n'ai pas d'ailes. Seulement des bras.

-Seulement des bras ! répéta le corbeau fort surpris. On ne peut pas voler avec ça ! Avance en marchant dans le ruisseau. Remonte le courant. Regarde. Tu vois les grosses pierres, là plus loin? Tu réussiras à y grimper, et tu pourras retourner chez toi.

-Merci, corbeau noir.


Juliette avança dans l'eau. Ça lui montait jusqu'au-dessus des genoux. Sa salopette toute mouillée pesait lourd et gênait ses mouvements. Elle marchait à présent entre les nénuphars et les roseaux. Elle vit une toile d'araignée.

Notre amie s'arrêta. La toile lui barrait le chemin. Elle aperçut l'araignée jaune, en plein milieu. Elle ne bougeait pas, mais la fillette en avait peur. Pourtant, il fallait passer.

Juliette avança doucement, en surveillant la petite bête, pour s'assurer qu'elle ne venait pas vers elle.

Plus loin, les grosses pierres annoncées par le corbeau apparurent au soleil. Elle s'y précipita.

Ce ne fut pas facile de se hisser dessus, mais elle réussit en tirant sur ses bras et en poussant sur ses pieds.

De là, en sautant d'une roche à l'autre, elle quitta la rivière et traversa la prairie en fleurs.


Juliette observa sa salopette sale et mouillée et ses chaussures pleines de boue. Elle se dit que ses parents n'allaient pas être contents. Notre amie risquait peut-être même une punition.

Plus loin, près d'une haie, se trouvaient des jolies fleurs, roses, blanches et bleues. Elle en cueillit un grand bouquet et revint à la maison.


-Papa, je t'apporte des fleurs de toutes les couleurs.

-Merci, ma chérie... Mais, que t'arrive-t-il ? Tu es toute mouillée.

-Je suivais un papillon et je suis tombée dans la rivière.

-J'aime que tu explores les environs de notre maison, mais il faut regarder où tu mets les pieds, ma tendresse. Monte à la salle de bain. Glisse tes habits dans la machine à laver, même tes petites baskets, et va te laver.

Et l'aventure de Juliette se termina sous la douche.