Juliette
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Les cinq pommes de pin

     Les oiseaux gazouillaient sous un ciel tout bleu.

Juliette, trois ans et demi, se promenait avec son papa. Ils venaient de quitter la maison, laissant maman s'occuper du bébé Bastien, le petit frère de notre amie. Ils se donnaient la main et ils chantaient.

- Promenons-nous dans les bois, tant que le loup n'y est pas. Si le loup y était, il nous mangerait. Loup, loup, es-tu là?

Juliette s'arrêta pour écouter. Elle observa les grands arbres de la forêt. Pas de loup en vue. Il n'y en a d'ailleurs pas dans ces bois-là.

- Mais le loup n'y est pas, il nous mangera pas.

Tout à coup, au pied d'un grand sapin, elle découvrit cinq pommes de pin, bien fermées.

Elle lâcha la main de son père et courut les ramasser. Elle les glissa dans la poche de sa salopette mauve.

Ils retournèrent à la maison.

 

- Papa, demanda Juliette, pourquoi ne s'ouvrent-elles pas? 

- Hier, il a plu beaucoup, ma chérie. Quand elles sont mouillées, les pommes de pin se replient. Pose-les sur la table dans ta chambre et attends qu'elles sèchent.

Au soir, la fillette les regarda avant de se mettre au lit. Elles restaient encore toutes fermées.

 

Le lendemain matin, quand elle s'éveilla, elle se précipita vers sa table. La première pomme de pin s'ouvrait.

Notre amie la prit entre ses doigts et y découvrit une fourmi à moitié endormie.

- Bonjour, dit Juliette. Que fais-tu là?

- Il pleuvait fort hier, répondit la fourmi. Je pensais que j'allais me noyer en revenant à la maison, la fourmilière, après mon travail. Alors, je me suis mise à l'abri, là-dedans.

- Que fais-tu comme travail?

- Je cherche des grains de blé et je les ramène chez nous. Parfois, je ramasse des aiguilles de sapin et je les apporte pour agrandir la fourmilière. On n'arrête pas de bouger chez les fourmis. On trouve toujours quelque chose pour s'occuper.

- Je pose la pomme de pin sur le bord de ma fenêtre, ainsi tu pourras descendre le long du mur et retourner chez toi si tu veux.

- Merci, dit la fourmi. Au revoir, petite fille. Je vais aller rejoindre mes copines.

 

La deuxième pomme de pin s'ouvrit vers dix heures du matin. Notre amie y aperçut un moustique.

- Que fais-tu là? demanda Juliette.

- Je me cache, répondit l'insecte.

- Pourquoi te caches-tu?

- Parce que tout le monde veut me tuer, m'écraser. On ne m'aime pas. Il faut dire que mon activité favorite est de me poser sur la peau des gens et de les piquer.

- Ce n'est pas gentil, dit la fillette. Personne n'aime se faire piquer par un moustique. Tu devrais cesser d'ennuyer tout le monde. Alors on te laisserait tranquille.

- Oui, mais que veux-tu... je suis un moustique. C'est dans ma nature de piquer.

- Je te laisse partir, mais ne viens pas te poser sur moi. 

 

La troisième pomme de pin s'ouvrit vers midi. Juliette l'emporta au jardin, avec les quatre autres. Celle-ci contenait des pétales rouges de coquelicots.

Notre amie entendit un oiseau chanter dans l'arbre, près de la rivière. Il ouvrit ses ailes et vint se poser près d'elle. Un rouge-gorge.

- Tu me rends mes pétales?

- Que font-elles dans une pomme de pin?

- Je les avais glissées là, à l'abri de la pluie.

- Et que comptes-tu en faire? interrogea la fillette.

- Je vais les mettre dans mon nid pour le garnir. Mon bébé sortira bientôt de son œuf. Je veux lui faire une belle surprise, un premier beau cadeau quand il naîtra.

- Bravo, applaudit Juliette. Quelle bonne idée ! Il découvrira en naissant un beau nid tout rouge. Tiens, viens chercher tes pétales. Les voici.


Notre amie entendit alors une petite voix derrière elle, de l'autre côté de la haie.

- Tu collectionnes des pommes de pin?

Juliette se retourna et reconnut Jeanine, sa voisine.

- Je les ai trouvées et ramassées sous un grand sapin, hier, en me promenant avec mon papa. Elles s'ouvrent l'une après l'autre car elles sèchent au soleil. Une fourmi s'abritait dans la première. Un moustique se cachait dans la deuxième. La troisième contenait des pétales de coquelicot.

- Regarde, dit Jeanine, la quatrième s'ouvre à son tour.

Les deux amies y découvrirent une bague bleu et or.

- Tiens, s'étonna Juliette. Que fait-elle là?

Elle la glissa à son doigt.

- Voleuse, lança une pie qui venait de se poser dans l'herbe. Rends-moi ma bague.

- Elle est à toi? demanda notre amie.

- Oui, elle traînait par terre à un arrêt de bus.

- Alors, c'est toi la voleuse, marmonna Juliette sans oser le dire trop haut, car elle avait un peu peur de la pie. Cette bague appartient à quelqu'un qui l'a perdue. Tiens, la voici. Prends-la, si tu veux.

-Tu peux la garder, répondit la pie. J'en possède beaucoup d'autres dans mon nid. Toute une collection.

Elle s'envola.


La cinquième et dernière pomme de pin ne s'ouvrit qu'au soir. Elle contenait une petite clé.

Juliette s'apprêtait à aller dormir. Notre amie la prit et la glissa sous son oreiller.

Cette nuit-là, elle rêva qu'elle découvrait un trésor au fond de son jardin...


Le lendemain matin, elle partit vers le grand sapin, celui au pied duquel elle avait ramassé les cinq pommes de pin avant-hier. Elle aperçut un trou entre les racines de l'arbre.

Juliette se mit à quatre pattes et gratta le sol humide. Elle découvrit un petit coffre en bois.

Saisissant alors la clé glissée dans la poche de sa salopette, elle la fit entrer dans la serrure. Elle tourna deux fois et ouvrit le couvercle.

Le coffret contenait des jolies perles de toutes les couleurs.

Juliette courut les montrer à sa maman, qui en fit un ravissant collier.

Notre amie fut très heureuse de le porter. Elle le montra à Jeanine, la voisine, et à toutes ses amies à l'école.

 

Merci à ma fille Béatrice qui vous raconte ce joli conte.